Congrès 2024 | Contre une éducation de la domination, pour des pédagogies de la liberté

La question pédagogique doit aujourd'hui être au centre de notre lutte syndicale car elle constitue un acte de résistance face aux réformes successives et notamment à la plus récente, celle d'Attal qui contribue à nous déposséder de ce qui fait notre métier : la réflexion, le choix, l'adaptation en fonction des situations singulières que nous rencontrons, la considération de nos élèvEs en tant qu'individuEs dont la complexité ne peut permettre une catégorisation (fortE/faiblE). La lutte pédagogique tient sur deux jambes : le refus (de la méthode imposée de Singapour, des groupes de niveaux, de certains programmes, etc.) et l'appropriation d'outils de travail qui permettent de défendre, de diffuser et de produire une autre idée de l'école.

Le SNU, le projet de l’uniforme, la labellisation des manuels scolaires ou la réforme du « Choc des savoirs », autant de projets aliénants du gouvernement qui montrent son intention évidente de transformer l’école en un espace inégalitaire, élitiste et réactionnaire.

La pédagogie ne doit pas être une arme de domestication, de contrôle des corps et d’exclusion.

Cela va à l’encontre de la vision que nous en avons comme : outil d’émancipation, de coopération, de créativité et de développement de l’esprit critique.

Or, dans un contexte aliénant de mise en concurrence et de surveillance de plus en plus accrue, consacrer du temps d'échange, de réflexion et de formation aux questions de pédagogie nous apparaît comme une nécessité incontournable : il s'agit de s'interroger sur l'école que nous voulons, d'interroger l'école telle qu'elle fonctionne et de ne pas faire du cœur de notre travail, un angle mort de la lutte syndicale.

SUD éducation 13 tient à faire de la question pédagogique inscrite dans un projet politique et social un axe structurant de son activité et de son identité :

Comment construire une école qui ne soit pas au service du maintien d'un ordre social existant ?

Comment mettre en œuvre des contenus et des pratiques émancipatrices ?

Comment déconstruire des postures, des gestes héritées de l'école et qui nous conduisent à reproduire malgré nous un système de domination contre lequel nous voulons pourtant lutter ?

Comment ancrer cette lutte individuelle et collective dans l'école telle qu'elle existe aujourd'hui ?

Comment récupérer des concepts, des idées, des pratiques pédagogiques que l'institution instrumentalise et dévoie ?

Nous tenons à ce que ces questionnements nous traversent touTEs comme un point de départ d'une conscientisation et d'une déconstruction nécessaires. Ainsi, un espace de discussion et d'échange peut se créer sur ce que nous vivons au quotidien dans la solitude de nos salles de classes. La coopération que nous souhaitons établir entre les élèvEs doit commencer par la nôtre : travaillons ensemble, échangeons, mutualisons et importons ces pratiques dans nos établissements.

Cette lutte nécessaire d'un combat pédagogique s'ancre dans le constat que nous faisons qui concerne tout autant les adultEs que les enfants.

Les projets du gouvernement s'opposent à une vision démocratique et émancipatrice de l'éducation.

Le gouvernement met à mal notre liberté et notre diversité pédagogique par la labellisation des manuels scolaires, la formation continue fléchée, la formation a minima pour le premier degré, des programmes souvent trop lourds et contraignants.

Il déconsidère nos métiers par la mise en place du Pacte qui contribue à produire un salaire au mérite, des inégalités entre les collèguEs et leur mise en compétition.

Il détruit les collectifs de travail : la diminution du temps de formation et son développement en distanciel, l'intensification des rythmes de travail amenuise la possibilité des temps d'échange entre collèguEs et accentuent la solitude dans nos métiers.

Il accroît les inégalités avec le classement et la mise en compétition des établissements scolaires entre eux.

Le gouvernement propose aux élèvEs une école de la soumission qui passe par une posture pensée et attendue de « bon soldat » dont le port de l'uniforme ou le SNU (un stage de 10 à 15 jours pendant les vacances, encadré par des personnes non formées de milieu civil et militaire, dont le budget est en partie pris sur celui de l’Éducation Nationale) sont des stigmates.

Mais également par la criminalisation des enfants dont les actes et les paroles sont trop vites considérées comme du prosélytisme comme nous avons pu le voir avec l'abaya ou lors des différentes commémorations de nos collègues assassinés.

De plus, le gouvernement propose une école plus réactionnaire avec les groupes de niveaux créant des groupes d'élitEs ou bien les évaluations nationales qui viennent renforcer les inégalités et mettre en compétition les élèvEs empêchant ainsi la création d'un environnement propice à la créativité, l'imaginaire et la possibilité de se tromper.

SUD éducation 13 condamne cette organisation élitiste, autoritariste, infantilisante et inégalitaire de l'école :

Nous condamnons les discours manipulateurs du gouvernement, notamment la proposition du PACTE présentée comme une solution pour répondre à une rémunération insuffisante. En effet, alors que les professeurEs font part de leur difficultés du nombre d'heures de travail, la réponse du gouvernement est de proposer plus de travail en présentant cela comme une revalorisation du métier.

Plus récemment, avec les groupes de niveaux, le gouvernement dit mettre en place une solution pour faire face à la baisse de niveau en français et en maths, mais ne dit pas comment il financera autant de postes en plus, alors qu'il y a déjà un manque de recrutement de professeurEs.

Derrière ces propositions, il y a une volonté de précariser le métier de professeurE, notamment en recrutant de plus en plus de contractuelLEs sans les former, les envisageant comme de simples exécutantEs, alors que nous demandons plus d'heures de formation, de temps d'échanges, et de pistes de réflexion sur nos méthodologies.

Nous condamnons le projet d'une école inégalitaire et élitiste proposée par le gouvernement. En effet, il a été démontré que les groupes de niveaux accentuent le sentiment de découragement pour les moins bonNEs élèvEs, cELLeux-ci étant pointéEs du doigt comme telLEs. A l'inverse, de nombreuxSES enseignantEs ont montré que l'hétérogénéité aidait l'ensemble du groupe dans les apprentissages, car pour expliquer  un concept ou une connaissance, il faut l'avoir saisie de manière précise. Par ces groupes de niveaux, l'institution ne cache plus sa volonté de promouvoir une école individualiste plutôt qu'une école coopérative qui ne laisserait personne en dehors.

Nous condamnons ces réformes qui créent des conditions défavorables à la mise en place des pédagogies émancipatrices.

Nous condamnons également la répression dont font actuellement l’objet certaines structures autogérées, expérimentales et émancipatrices du territoire dans le but de les dissoudre, de les dénaturer ou de les ramener sous l’autorité/dans le moule d l’Institution

Pour une école plus égalitaire et émancipatrice, SUD éducation 13 réaffirme les orientations fédérales prises en congrès en 2022 et revendique :

  • la fin des évaluations permanentes

  • la mise en œuvre de moyens nécessaires, notamment une formation qui permettent aux futurEs enseignantEs de pratiquer de la pédagogie différenciée et d'avoir des connaissances sur les différentes pédagogies émancipatrices existantes

  • une revalorisation des statuts d'AESH

  • des temps d'échanges dans la formation initiale et continue autour des pédagogies émancipatrices, qui enseignent pour ne citer que quelques aspects : la démocratie, la coopération, l'accueil de la diversité comme une richesse, la pédagogie de dialogue ou horizontale et non la pédagogie bancaire ou vertical

  • la baisse des effectifs dans les classes

  • une véritable augmentation des moyens matériels alloués aux établissements

  • la possibilité de faire classe hors les murs,

  • le respect de la liberté pédagogique et l’arrêt du projet de labellisation des manuels scolaires par le Conseil Supérieur des Programmes (CSP).

Pour SUD éducation 13 il est donc nécessaire de construire une école qui ne soit pas au service du maintien d'un ordre social existant.

L’école et la formation des citoyenNEs est un sujet éminemment politique, changer l’école pour changer la société est d’autant plus d’actualité.

SUD éducation 13 doit défendre les pédagogies émancipatrice et cELLeux qui les font vivre. Il nous semble important de continuer à proposer des stages sur les pédagogies émancipatrices, à faire vivre des groupes de travail et à organiser des groupes d’échange de pratiques.

Luttons pour une école émancipatrice qui donne à touTEs les élèvEs les outils et les connaissances nécessaires pour comprendre le monde dans lequel iEls évoluent et qui développe l'esprit critique indispensable pour construire un autre monde.

Luttons pour une école émancipatrice où chacunE est reconnuE, accueilliE, respectéE

Luttons pour une école émancipatrice qui défend et produit l'inclusion, l'anti-racisme, l'anti-sexisme, la décolonisation des savoirs, l'internationalisme.