Brigades numériques dans l’académie d’Aix-​Marseille : face au manque de personnels, la nouvelle dérive du Rectorat vers une numérisation totale de nos métiers

Depuis maintenant 18 mois que siège SUD éducation en CSA académique, il n'y a pas eu une réunion sans que les représentant·es de l'administration ne se désolent du manque d'attractivité des métiers de l'enseignement et des difficultés colossales qui sont parfois les leurs pour recruter suffisamment d'enseignant·es (il manquait par exemple près de 70 postes en lettres à la rentrée de septembre 2023...).

Manifestement, le recours à des personnels contractuels touche déjà ses limites. Quand face à la dégradation quasi continue des conditions d'emploi et de travail des personnels de l'Éducation nationale, le sésame habituel du recours à des contrats précaires ne fonctionne plus, on pourrait croire que les questions des rémunérations et des conditions de travail comme le nombre d'élèves par classe pourraient enfin devenir un sujet de préoccupation.

Malheureusement non.

Lors du CSA du 28 mai de l'académie d'Aix Marseille, l'administration a présenté la nouvelle expérimentation qui se mettra en place en septembre 2024 et qui constitue selon elle la solution aux absences non remplacées : mettre des enseignant.es derrière des écrans et des caméras pour qu'iels puissent intervenir face à des classes entières en visio...

Le rectorat s’inspire de l’académie de Nancy Metz et décide ainsi de transformer 11 postes de TZR en 11 brigades numériques. Onze postes de TZR qui ne pourront plus venir dans les établissements effectuer les remplacements face aux élèves.

Alors que le remplacement des enseignant·es absent·es est déjà un véritable problème dans les établissements, le choix est fait d'accentuer la pression en supprimant des postes essentiels ! À un criant manque de personnels, le Rectorat choisit de répondre par une réponse techniciste qui est une nouvelle étape vers la dématérialisation de nos métiers. C'est inacceptable !

Les personnels exerceront leur mission dans une salle dédiée dans un établissement de rattachement (RAD) où le matériel requis sera mis à leur disposition (ordinateur, casque, accès internet etc). Divers scénarios sont prévus. Les élèves réunis dans une salle de classe dans leur établissement seront surveilléEs par des personnels AED. Le dispositif est destiné au secondaire : collège et lycée général et professionnel, y compris pour les dispositifs tels que les classes SEGPA.

Les organisations syndicales ont unanimement exprimé leur inquiétude et leur opposition face à ce dispositif. Opposition de principe étant donné les limites démocratiques structurelles - cette décision du Rectorat n'a pas été mise au vote - que constitue le dialogue social dans la Fonction publique.

SUD éducation et les autres organisations syndicales ont dénoncé le mépris pour les AED que représente l'absence de moyens affectés aux vies scolaires pour assurer cette mission supplémentaire. Sous-dotées de manière structurelle, les vies scolaires fonctionnent en permanence en sous effectif. Ce dispositif va accentuer la pression sur les AED et participer à la dégradation de leurs conditions de travail au quotidien.

SUD éducation a également appelé à la vigilance sur les risques relatifs à la cybersécurité et sur la nécessité de penser les aspects matériels de ce dispositif (matériel informatique requis pour les personnels et les élèves, aménagement de salles dédiées ). Dans de nombreux établissements, les conditions matérielles ne sont pas réunies. 

Plus généralement, pour SUD éducation un cours en visio permet seulement de maintenir un lien avec des élèves isolé·es, mais en aucun cas il ne constitue une relation pédagogique réelle ou satisfaisante.

L’apparition d’outils de communication numériques a entraîné ces dernières décennies un changement de paradigme dans nos pratiques professionnelles : perte de contrôle sur notre temps et nos espaces de travail, délitement des rapports sociaux entre collègues et avec nos élèves, flots de mails... Pour  SUD education, cette "évolution" constitue une véritable mise en danger pour nos métiers !

Nous avons également dénoncé le fait que cette expérimentation puisse entraîner un effet cliquet et qu'aucun retour en arrière ne sera ensuite possible !
Les organisations syndicales ont demandé à ce que les associations de parents soient informées qu’à la rentrée prochaine leurs enfants pourraient recevoir un enseignement distancié. Autre demande : un bilan au terme de la première année et ensuite au terme des trois années d'expérimentation. Le rectorat a invité les OS à participer pour définir les critères de cette évaluation.

Pour SUD éducation ces brigades numériques, (même expérimentales et provisoires pour 3  ans) sont une fausse solution. Nous revendiquons :

- l’ouverture de postes aux concours

- le recrutement massif de personnels d’éducation

-  la titularisation des personnels précaires sans conditions